Lorsqu’il existe, le contrôle fédéral est de deux types. Tout d’abord, l’Institut Fédéral de la Propriété Intellectuelle (IPI) surveille la gestion administrative de la société ; en outre, il existe un contrôle sur les tarifs de redevance pratiqués par la société, qui est du ressort de la Commission arbitrale fédérale pour la gestion de droits d’auteur et de droits voisins.
Le contrôle sur la gestion administrative
Ce contrôle se manifeste par plusieurs aspects:
- les sociétés de gestion doivent être au bénéfice d’une autorisation d’exercer délivrée par l’IPI (art. 41 LDA). La loi prévoit que l’autorisation, en règle générale, ne sera accordée qu’à une seule société par secteur (art. 42 al. 2 LDA): par exemple, une société pour la musique, une société pour la littérature, etc. Cela entraîne une importante simplification car les utilisateurs peuvent acquérir les droits auprès d’une seule adresse. On peut dire que cette simplification favorise le respect de la propriété littéraire et artistique;
- la loi définit certaines règles que les sociétés de gestion doivent suivre. Elles sont tenues de sauvegarder l’égalité de traitement, de gérer leurs affaires de manière saine et économique, elles ne doivent pas viser de but lucratif, etc. (art. 45 LDA). Il appartient à l’IPI d’assurer le respect de ces obligations. Celui-ci doit aussi approuver le rapport d’activité des sociétés (art. 53 al. 1 LDA), de même que leurs règlements de répartition, c’est-à-dire les règles déterminant comment les redevances seront distribuées aux ayants droit (art. 48 al. 1 LDA).
D’après l’art. 49 al. 1 LDA, les sociétés devront répartir le produit de leur gestion proportionnellement au rendement de chaque œuvre et de chaque prestation. En d’autres termes, il faudra rémunérer chaque auteur d’un bien protégé proportionnellement à ce que la société de gestion a encaissé pour lui (« à chacun son dû »). Mais, si cette répartition entraîne des frais excessifs, les sociétés de gestion pourront évaluer le rendement des œuvres et des prestations (art. 49 al. 2 LDA). Parallèlement, l’art. 51 LDA oblige les utilisateurs à fournir aux sociétés tous les renseignements dont elles ont besoin pour la répartition. D’après cette disposition, une telle obligation n’existe toutefois que si son respect peut raisonnablement être exigé des utilisateurs. En résumé, compte tenu des principes légaux, il faudra distinguer deux types de répartition : d’une part, la répartition sur la base des listes d’œuvres effectivement utilisées, fournies par les utilisateurs (il s’agit normalement de fichiers électroniques traitables automatiquement) ; d’autre part, la répartition sur la base d’évaluations, c’est-à-dire sur la base de données statistiques représentatives recueillies par les sociétés de gestion. Ce procédé est utilisé lorsqu’une répartition exacte serait trop onéreuse ou, de manière générale, lorsque le principe de la proportionnalité l’impose. Pour les deux types de répartition, les dispositions réglementaires pertinentes devront être approuvées par l’IPI.
Le contrôle sur les tarifs
Dans les domaines soumis à la surveillance fédérale, les tarifs des sociétés, qui servent à calculer les redevances réclamées aux utilisateurs, font l’objet d’une procédure particulière: les sociétés doivent tout d’abord négocier leurs tarifs avec les associations représentatives des utilisateurs (art. 46 al. 2 LDA). Par exemple, pour les utilisations à des fins pédagogiques, ProLitteris négociera le tarif commun 7 avec les organisations faîtières du domaine de l’enseignement, dont la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l’instruction publique (CDIP). Après négociation, les sociétés de gestion devront soumettre leurs tarifs à l’approbation de la Commission arbitrale fédérale pour la gestion de droits d’auteur et de droits voisins (art. 46 al. 2 et 55 LDA). Celle-ci comprend trois membres neutres et des représentants des sociétés de gestion et des associations représentatives d’utilisateurs (art. 56 LDA). Il s’agit donc d’un organe paritaire. Avant de se prononcer, la Commission arbitrale prendra l’avis du Préposé à la surveillance des prix, qui s’exprimera à titre consultatif (art. 15 al. 2bis LSPR ; voir RSPI 1996, p. 437 ss, c. 4). Pour rendre sa décision, elle s’appuiera sur les art. 59 et 60 LDA. Ensuite, il y aura une possibilité de recours au Tribunal administratif fédéral (art. 74 al. 1 LDA), puis au Tribunal fédéral (il s’agit d’un recours en matière de droit public: art. 82 lit. a et art. 86 al. 1 lit. a LTF ; arrêt du TF dans l’affaire 2C_658/2008, c. 1.1). Une fois approuvés, les tarifs sont publiés (art. 46 al. 3 LDA) et la loi prévoit qu’ils lient le juge dès leur entrée en vigueur (art. 59 al. 3 LDA).
On compte plusieurs dizaines de tarifs différents approuvés par la Commission arbitrale, pour autant d’utilisations d’œuvres différentes. Cette diversité, de même que la complexité de certains tarifs, sont parfois critiquées. Elles peuvent en effet compromettre la transparence du système. Depuis quelques années, les sociétés de gestion s’efforcent d’ailleurs de simplifier leurs tarifs et d’en diminuer le nombre. Il faut cependant se rappeler que les tarifs sont issus de négociations avec les associations représentatives d’utilisateurs. Dans la plupart des cas, ces négociations aboutissent à un accord. Par conséquent, il faut présumer que la diversité et le contenu des tarifs correspondent aussi à un besoin des utilisateurs d’œuvres et de prestations protégées. Afin de mieux tenir compte des particularités de tel ou tel groupe d’exploitants, il peut se justifier de créer un tarif spécifique ou contenant des règles différenciées.
FAQ
Oui…et non ! Le droit à rémunération découlant des art. 19 al. 1 lit. b et 20 al. 2 LDA ne peut être exercé que par les sociétés de gestion autorisées par l’IPI. Sa gestion est soumise à la surveillance de la Confédération. Le montant des redevances est fixé par le tarif commun 7, qui est administré par ProLitteris. Cette dernière représente aussi les autres sociétés de gestion. ProLitteris doit négocier le tarif commun 7 avec les associations faîtières du domaine de l’enseignement, puis le soumettre à l’approbation de la Commission arbitrale fédérale pour la gestion de droits d’auteur et de droits voisins (art. 46 al. 2 et 55 LDA). Une fois approuvé, le tarif lie le juge (art. 59 al. 3 LDA). Il est donc contraignant et les écoles ne peuvent plus remettre en cause le montant des redevances qu’il prévoit ou obtenir d’autres conditions. En contrepartie, elles sont toutefois assurées d’obtenir tous les droits auprès d’une seule adresse, cela sans complication excessive.
La gestion du droit de mettre de la musique à disposition sur internet, pour une consultation à la demande (art. al. 2 lit. c in fine LDA), n’est pas contrôlée par la Confédération. Dans ce domaine, SUISA est soumise aux lois du marché et de la concurrence. Cela signifie qu’elle ne gère pas les droits sur toutes les œuvres. L’utilisateur devra donc préalablement faire des recherches pour savoir à qui demander les licences nécessaires. A supposer que SUISA soit compétente, les redevances ne seront pas fixées par des tarifs contraignants, mais par de simples conditions de licence de droit privé. SUISA se basera sur celles-ci pour réclamer son prix. Mais, fondamentalement, c’est la liberté contractuelle qui s’appliquera. L’utilisateur et SUISA pourront librement s’entendre sur un montant de redevance tenant compte des circonstances particulières. Il y aura donc plus de flexibilité que si le domaine était soumis à la surveillance de l’Etat. Par contre, le processus d’acquisition des droits sera plus compliqué.