Protection de la mémoire – protection de la personnalité pour les œuvres tombées dans le domaine public
En droit suisse, les droits de la personnalité s’éteignent en principe au décès de la personne concernée, exception faite des droits moraux des auteurs, qui survivent à ces derniers pendant 70 ans (50 ans pour les logiciels). Concrètement, quelles implications cela a-t-il, par exemple, pour la photo d’une personne décédée quand cette photo est tombée dans le domaine public parce que le photographe est mort depuis plus de 70 ans? Comme la photo est dans le domaine public, elle peut en principe être utilisée sans restriction. Aucune autorisation n’est plus nécessaire, et, comme les droits moraux de l’auteur s’éteignent également 70 ans après son décès, la photographie, si par exemple elle n’a pas encore été divulguée (art. 9, al. 2 LDA), peut maintenant l’être ou peut être modifiée (art. 11, al. 1, let. a LDA ). Mais cela n’est pas valable sans limite: en effet, même si les droits de la personnalité tant du photographe que de la personne photographiée se sont éteints, la loi reconnaît une certaine protection des survivants de la personne décédée, protection qui dérive de leur propre droit de la personnalité. Concrètement, il s’agit de la protection du souvenir qu’ils gardent de la personne décédée. Ainsi, un parent de la personne photographiée décédée peut être lésé de façon inadmissible lorsque la représentation de cette personne est diffamée. Dans le contexte des droits d’auteur sur une telle photo, il peut donc arriver que la photo soit certes tombée dans le domaine public, mais qu’en raison de la protection de la mémoire de ses proches elle ne puisse pas être librement utilisée. Car les proches pourront se défendre sur la base de leur propre droit de la personnalité au cas où une utilisation dégradante de l’œuvre porterait atteinte à leur souvenir de la personne décédée. (ATF 109 II 353, 359)