Les mesures provisionnelles de droit civil (Art. 65 LDA) ont pour objet de fournir une protection provisoire dans une affaire judiciaire, jusqu’à sa décision finale. Cela parce que la mise en œuvre des droits par les personnes qui subissent une atteinte, ou risquent d’en subir une, peut être délicate, en particulier en raison des délais de procédure ordinaires.
Par exemple, à la fin d’un procès au fond, la protection demandée pourrait devenir sans objet, parce que le défendeur a détruit le matériel de preuve. Si l’on n’intervient pas rapidement pour assurer la conservation des preuves, il y a donc un risque de préjudice difficilement réparable.
C’est pourquoi la loi a prévu des mesures provisionnelles qui peuvent être demandées avant une procédure au fond. Généralement, il faut que le défendeur soit entendu avant que le juge décide sur la requête. Mais en cas d’urgence particulière, notamment s’il y a risque d’entrave à leur exécution, le juge peut ordonner les mesures provisionnelles immédiatement sans entendre le défendeur (art. 265 CPC).
Une mesure provisionnelle nécessite les conditions suivantes :
1. Urgence
Une mesure provisionnelle ne peut être ordonnée que s’il n’est pas possible d’attendre la fin du procès au fond. La partie requérante doit agir immédiatement si elle veut profiter d’une mesure provisionnelle.
Au cas où la partie requérante hésiterait, il y a un risque que la cour interprète ce comportement comme abusif et rejette l’ordonnance d’un telle mesure. Par exemple : Le demandeur a attendu trop longtemps et aurait pu introduire une action civile ordinaire avant de subir le dommage qu’il veut faire réparer.
2. Vraisemblance d’un préjudice difficilement réparable
Au moment où le demandeur dépose sa requête de mesures provisionnelles il ne doit pas présenter des preuves strictes concernant la violation de ses droits. Il n’est d’ailleurs souvent pas capable de le faire à ce stade. La loi prévoit seulement que la partie requérante rende vraisemblable qu’elle a subi une violation d’un droit (droit d’auteur) ou qu’elle risque d’en subir une et que la violation va entraîner un préjudice difficilement réparable.
Les buts dans lesquels on peut demander des mesures provisionnelles sont notamment les suivants (art. 65 LDA) :
● assurer la conservation des preuves ;
● déterminer la provenance des objets confectionnés ou mis en circulation de manière illicite ;
● préserver l’état de fait ;
● assurer à titre provisoire la prévention ou la cessation du trouble.
Les buts énoncés par l’art. 65 LDA ne sont pas exhaustifs.
Ainsi, peuvent notamment faire l’objet d’une demande provisionnelle :
- la saisie d’exemplaires d’œuvres,
- une inspection par un expert,
- la demande qui tend à dresser un inventaire,
- la collecte d’informations et renseignements pour établir la provenance, la quantité et les destinataires des objets litigieux,
- le fait d’empêcher l’utilisation, la production ou l’introduction dans le commerce d’œuvres piratées,
- la saisie des exemplaires contrefaisants et du matériel de fabrication.
Le juge peut donc ordonner la saisie et confiscation de documents ou échantillons pour conserver des moyens de preuve avant ou pendant un procès pour violation du droit d’auteur, ou encore empêcher (momentanément) l’utilisation contrefaisante d’une œuvre qui causerait un préjudice au titulaire des droits d’auteur.
Les mesures provisionnelles doivent être propres à prévenir ou à faire cesser le préjudice (art. 262 CPC) et elles doivent respecter le principe de proportionnalité. C’est-à-dire que le juge ne peut qu’ordonner les mesures qui sont nécessaires et appropriées au but poursuivi et qui limitent les droits de l’autre partie le moins possible.
À ENVISAGER
Si le souci est exclusivement de préserver les droits pécuniaires du demandeur avant une procédure au fond, au lieu de bloquer l’utilisation prétendument illicite d’une œuvre en ordonnant une interdiction ou une cessation, le juge peut ordonner à la partie adverse de fournir des sûretés appropriées visant la sauvegarde des droits (cf.art. 261, al. 2 CPC).).
BON À SAVOIR
Il n’est pas suffisant d’alléguer qu’une œuvre a été utilisée sans droit et que cette utilisation risque de causer une grave perte pécuniaire ou un dommage à la réputation. Il faut rendre vraisemblable les faits et les conséquences qu’on énonce, en produisant devant le juge des éléments de preuve. Les déclarations écrites spontanées de témoins ou encore les expertises privées peuvent être utiles pour rendre vraisemblables les prétentions mais devront par la suite faire l’objet au fond de vérification approfondie.
S’il existe un risque que la partie adverse dissimule les produits contrefaits qu’elle est suspectée posséder dans le cadre d’une procédure judiciaire, la partie prétendument lésée peut demander au juge de procéder à la saisie des marchandises sans l’entendre.
Si après la procédure concernant les mesures provisionnelles en procédure sommaire, l’action au fond n’est pas encore pendante, le tribunal impartit au requérant un délai pour le dépôt de la demande au fond, sous peine de caducité des mesures ordonnées (art. 263 CPC).
Cela n’est pas exigé si la procédure sommaire vise uniquement à demander une preuve à futur au sens de l’art. 158 CPC.
Dans ce cas, il s’agit simplement d’administrer une preuve, par exemple en demandant une expertise, lorsque la mise en danger d’un moyen de preuve ou un intérêt digne de protection est rendu vraisemblable par le requérant. Selon l’art.158 CPC le juge administre les preuves en tout temps, lorsque la loi confère le droit d’en faire la demande ou lorsque la mise en danger des preuves ou un intérêt digne de protection est rendu vraisemblable par le requérant.
Par exemple s’il y a le risque que des exemplaires contrefaisants et du matériel de fabrication puissent être détruits, le requérant peut demander au juge une expertise pour déterminer le caractère illicite de ces objets immédiatement.
FAQ
Les mesures provisionnelles (Art. 65 CdP ) ont pour objet la protection provisoire dans une affaire judiciaire. La loi a prévu des mesures provisionnelles qui peuvent être demandées avant une procédure au fond afin d’établir un dommage et évaluer sa portée (inspection par un expert, demande d’informations …), ou faire cesser une atteinte et ainsi limiter le dommage subi (saisie d’exemplaires contrefaisants, du matériel de réalisation). Des mesures provisionnelles peuvent être demandées pour assurer la conservation des preuves, déterminer la provenance des objets confectionnés ou mis en circulation de manière illicite, préserver l’état de fait, assurer à titre provisoire la prévention ou la cessation du trouble.
Les mesures provisionnelles doivent faire l’objet d’une audition préalable de la partie adverse. Toutefois, en cas d’urgence particulière, notamment s’il existe un risque d’entrave à leur exécution, le tribunal peut ordonner des mesures provisionnelles immédiatement, sans entendre la partie adverse.
On distingue procédure au fond et procédure sommaire en particulier dans le cadre de mesures provisionnelles. Dans le premier cas, le demandeur doit apporter la preuve stricte de ses droits. Dans le cadre de mesures provisionnelles en procédure sommaire, il suffit de rendre les droits vraisemblables. En tout cas une simple déclaration de la partie lésée n’est jamais suffisante.
Normalement les moyens de preuve en procédure sommaire sont rapportés par titres.
Dans cette procédure particulière d’autres moyens de preuve sont admissibles, à condition que leur administration ne retarde pas sensiblement la procédure.
Il faut rendre vraisemblable les faits et les conséquences énoncés, en livrant des documents au juge. Les déclarations écrites de manière spontanée de la part de témoins ou encore les expertises privées peuvent être utiles pour rendre vraisemblables les prétentions mais devront par la suite faire l’objet de vérification.
Le demandeur doit agir dès que possible. Au cas où le demandeur tarderait, il risque d’être suspecté par la suite d’abus de droit.
Si l’action au fond n’est pas encore pendante, le tribunal impartit au requérant un délai pour le dépôt de la demande au fond, sous peine de caducité des mesures ordonnées. Cela n’est pas exigé si la procédure sommaire vise uniquement à demander une preuve à future.